L’odyssée de Baptiste » coté sud 2002
…L’antre de Baptiste a des airs d'officine où se préparent d'étranges alchimies. Au fond de l'atelier, contre la paroi vitrée une lumière blanche traverse d'illusion une horde de bouteilles et autres flaconnages de verre flanqués d'étiquetages divers. Parfois anonymes, la plupart des contenants sont identifiés par une écriture indistincte, plutôt noire, inscrite le long de sages lignes d'écolier. Les quatre coins du monde reposent, tout simplement au fil de cette mince étagère de bois. Précieux écrins dans leur transparence un peu trouble, les petits pots poudrés, renferment une mystérieuse récolte faite d'eau de pluie et d'eau de mer, de cailloux, de roches, de minerais, de bouts de terre. Terre souple, ferme, crayeuse, de couleur ocre, rousse ou noire, leurs noms évoquent la Méditerranée mythologique: Ithaque, Stromboli.... Issues d'îles grecques, Turques, d'archipels du nord de la Sicile, chacune d'elles signale les multiples périples marins et terrestres de Baptiste. Voyageur insolite semblable à un explorateur de la nuit des temps, celui-ci prélève, cueille et capture le cœur des pays traversés ou recueille l'eau céleste tombée du ciel, celle des mers parcourues inlassablement par son bateau.
Ces reliques de terre et d'eau sont la matière sacrée de ses toiles, elles tissent le corps de sa peinture. Peinture de signes, de traces, d'empreintes, rythmée de cartes et de frontières, elle rappelle les carnets de route des premiers voyageurs où s'imprime le moule de l'expérience vécue, la mémoire de la chose perdue. Dans le sillage d'Ulysse, omniprésent, l'artiste reprend avec émerveillement les mêmes routes et remonte le fil des origines. Sédiment de toutes les histoires humaines, le héros de l'Odyssée s'immisce dans l’œuvre comme le ferment et la source imaginaire d'un perpétuel questionnement…
(Caroline Clavier in « l’odyssée de Baptiste » coté sud 2002)